Un Louvre de lumière et de mystères

Figurant parmi les plus célèbres musées au monde, le Louvre n’a jamais cessé de se transformer et de s’embellir depuis sa naissance au xiie siècle, tout en conservant sa part de mystérieux et d’insolite. Un Louvre d’histoires à feuilleter.

Les vies plurielles du Louvre

Tout commence par une bataille d’experts en étymologie. Sur l’origine du nom Louvre, il y a ceux qui, s’appuyant sur le terme “lupara” (loup), y voient un lieu abritant des équipages de louveterie. Pour d’autres, le nom viendrait de l’ancien français “lauern” ou “lower” (tour de guet) ou du saxon (camp fortifié). Tel devait être le Louvre avant le Louvre, précédant neuf cents ans d’histoire d’un édifice devenu royal puis muséal.

Un Louvre protecteur. Par la volonté de Philippe-Auguste, les travaux d’édification d’une forteresse débutent en 1190. À charge aux architectes et aux ouvriers d’élever un quadrilatère de 78 mètres sur 72, ceinturé de fossés et de tours circulaires qui protègeront un donjon de 30 mètres de hauteur. Un véritable arsenal qui défend le côté ouest de la ville, encore vulnérable.

Un Louvre royal. Les travaux durent douze ans. En 1204, un document fait pour la première fois mention du Louvre. La forteresse ainsi bâtie perdure jusqu’en 1364. En un siècle et demi, Paris s’est agrandi et le Louvre se trouve désormais encerclé de maisons, perdant dès lors son rôle défensif. Charles V lui offre un nouveau cadre de vie en le transformant en résidence royale, lieu d’agréments aux décors raffinés. Une première mue qui se prolonge jusqu’à la mort de Charles le Fou en 1422. À cette date, le Louvre est abandonné. Une traversée du désert qui dure plus d’un siècle, jusqu’à l’intervention de François Ier. Le temps de la Renaissance est arrivé pour le Louvre.

Un Louvre Renaissance. Le donjon est le premier à tomber sous les coups de pioches de la rénovation, suivi par l’aile sud médiévale remplacée par une nouvelle aile moins austère. Mais c’est surtout l’intérieur qui subit les plus grandes transformations. Les travaux vont bon train, s’étalant de 1527 à 1564. Pourtant, le Louvre subit la concurrence du nouveau château des Tuileries, construit à moins de 500 mètres, par la volonté de Catherine de Médicis. Dès lors, la nécessité de relier les deux édifices par le biais de galeries donne un nouvel aspect au Louvre, la Grande Galerie, longue de 450 mètres, étant achevée en 1610. Le Louvre pluriel se compose désormais de vestiges médiévaux, de parties Renaissance et de nouvelles constructions.

Un Louvre académique. Sous l’influence de Louis XIII et de Louis XIV, le Louvre connaît tout au long du Grand Siècle de nombreux aménagements. Pourtant, le Roi-Soleil n’a plus que le regard tourné vers son Versailles, provoquant l’abandon du Louvre en tant que résidence royale. L’Académie française prend d’abord possession du lieu avant de céder sa place à l’Académie des Inscriptions et des Belles Lettres puis à l’Académie royale de Peinture et de Sculpture, dernier occupant du Louvre avant la Révolution. Un premier pas vers sa fonction muséale, les artistes de l’Académie y exposant leurs œuvres dès 1699.

Louis XV achèvera ensuite les travaux débutés par Louis XIV, faisant disparaître les derniers vestiges des premiers temps de sa construction.

Révolution au Louvre. Au-dessus de la galerie d’Apollon subsiste encore l’acte fondateur du Louvre-musée : « Fondé le 16 septembre 1792 par décret de l’Assemblée législative, a été ouvert le 10 août 1793 en exécution d’un décret rendu par la Convention nationale. » Désormais dévolu « à la réunion de tous les monuments des sciences et des arts », le Muséum central des Arts est ouvert en priorité aux artistes avant d’accueillir un public curieux de découvrir les collections royales et les biens prélevés sur les émigrés.

Avec les guerres napoléoniennes, qui se déroulent à travers l’Europe et jusqu’en Égypte, le Muséum s’enrichit de nombreux trésors, issus d’un véritable pillage, notamment dans la péninsule italienne. Une prospérité éphémère, le Louvre se vidant de ces œuvres volées dès l’effondrement de l’Empire.

Durant la première moitié du xixe siècle, le Louvre s’agrandit du musée des Antiques (l’égyptologue Champollion devenant conservateur des Antiquités égyptiennes en 1826), du musée de la Sculpture moderne (1824), du musée Charles X en 1827 et du musée assyrien vingt ans plus tard.

Sous le Second Empire intervient une nouvelle phase de travaux, un bâtiment le long de la rue de Rivoli reliant définitivement le musée aux Tuileries, la cour Napoléon s’intégrant à cet ensemble.

Le Louvre moderne. Les événements sanglants de la Commune de Paris en 1871 touchent les Tuileries qui sont incendiées, menaçant le Louvre désormais entièrement consacré à la culture. Des phases d’agrandissement, d’aménagement et d’ouverture de salles se succèdent tout le long du xxe siècle, offrant au Louvre son aspect moderne.

En septembre 1981, moins de quatre mois après son élection, François Mitterrand présente le projet de Grand Louvre, confié deux ans plus tard à l’architecte chinois Pei. Le 30 mars 1989, la pyramide du Louvre, tant décriée, est inaugurée, suivie en 1993 par l’ouverture de l’aile Richelieu.

Ainsi, en neuf siècles d’existence, le Louvre n’a cessé de faire sa mue, de la forteresse originelle voulue par Philippe-Auguste au Louvre actuel, que des millions de pas continuent à arpenter et des millions d’yeux à contempler.

 Le Louvre insolite

Médor, chien fidèle

Le Louvre, au cours de sa longue histoire, s’est trouvé associé aux événements qui ont secoué la capitale. Ainsi lors des “Trois Glorieuses” de 1830 qui voit le peuple de Paris s’insurger une nouvelle fois en apprenant la décision du roi Charles X de ne plus gouverner qu’au moyen des Ordonnances, faisant fi des résultats des élections législatives qui voient l’opposition devenir majoritaire.

Le Louvre, dont la proximité des Tuileries n’est pas forcément un gage absolu de sécurité, est attaqué par des meutes d’insurgés, au nombre de quatre cents à cinq cents, dont le mot d’ordre est : « Pas de quartier ! » Deux attaques sont suffisantes pour enlever le bâtiment et trucider ses défenseurs, prestement enterrés à l’angle de la colonnade du Louvre.

Outre, sans doute, l’inconsolable deuil des familles des victimes, un barbet ne peut se résoudre à quitter son maître enseveli, se couchant au-dessus de sa sépulture. Pris de compassion devant cet animal, les gardes nationaux prennent le chien en affection, au point d’en faire leur mascotte et de lui donner le doux nom de Médor. Peut-être en hommage de ceux qui venaient de s’endormir d’un sommeil éternel !

Belphégor : entre malédiction et fascination

Son visage a longtemps hanté nos nuits d’enfant. Jusqu’à se perpétuer dans la mémoire collective et d’en faire une série-culte.

En mars 1965, durant les quatre épisodes qui voient André Bellegarde traquer le fantôme du Louvre, la France du petit écran se passionne et frémit à l’apparition de Belphégor, flottant dans sa longue robe noire tout le long des couloirs du Louvre.

Réincarnation dans un corps humain d’une momie d’un roi égyptien dont la colère d’avoir été exhumé se traduit dans son regard glacial, Belphégor appartient aux mystères de l’Égypte antique qui ont de tout temps fait fantasmer les auteurs, s’inscrivant dans la rumeur d’une malédiction qui frapperait les archéologues coupables de les avoir fait revenir au grand jour.

Si Belphégor appartient bien à la mythologie égyptienne – du dieu Baal révéré sur le mont Pe’or –, ce démon doit sa réputation à l’écrivain Arthur Bernède qui lui consacra un roman en 1927. Auteur prolixe – une centaine de romans (dont Judex), de pièces et d’opéras-bouffes –, Bernède n’imaginait sans doute pas que son personnage rivaliserait avec La Joconde dans la galerie des personnages majeurs du Louvre. Au point de s’effacer devant son héros !

Un Louvre si mystérieux ?

Si le Louvre ne doit pas sa réputation au Da Vinci Code, le livre de Dan Brown a largement contribué à accroître le côté mystérieux et ésotérique du plus célèbre musée du monde et à créer autour de ses collections et de ses salles un véritable folklore touristique.

Car le parcours du Da Vinci Code n’est rien d’autre qu’une interprétation romanesque et fumeuse d’une réalité bien plus académique. Autant dire qu’il y a à boire et à manger, du lard et du cochon dans ce décryptage imaginaire qu’utilise le romancier américain à longueur de pages. Exemple : La “Rose ligne” du roman n’est en fait, si chacun veut bien se pencher sur son histoire, que le parcours réalisé par l’artiste Jan Dibbets, reprenant le tracé du méridien universel de Paris défini en 1806 par l’astronome Arago.

La pyramide du Louvre n’échappe pas à ce folklore, née selon certains sur l’oreiller des confidences entre un président de la République et une célèbre astrologue. Grand initié des questions ésotériques et égyptologiques, le “Sphinx” aurait guidé l’inspiration de l’architecte Pei. Les 666 panneaux de verre qui composent la pyramide correspondraient au chiffre de l’apocalypse. D’autres parlent de 698 ou de 789, ce dernier en hommage à la Révolution française. Que nenni ! Le chiffre qui se veut officiel est de 673 losanges et triangles, celui de 666 n’ayant été qu’une invention des opposants à la pyramide au début de sa construction, histoire de diaboliser le futur édifice. De quoi y perdre ses mathématiques et donner du grain à moudre à ceux qui pensent qu’il n’existe pas de légendes ne possédant pas un brin de vérité.

La Joconde n’est bien sûr pas oubliée. Dan Brown participe au mythe et aux interprétations fantaisistes qui entourent le tableau depuis sa création. Fermez le ban ! Mona Lisa n’a pas besoin d’une telle publicité pour faire rêver !

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