IX- 1993-1997. La spirale infernale
1- Un lourd passif
Depuis longtemps, la rumeur bruissait dans les tribunes et dans les discussions de comptoir. Que le club vivait au-dessus de ses moyens ; que les succès tournaient les têtes. Vertige de l’argent et de la démesure. Ce n’est donc pas à proprement parlé une surprise quand, en ce vendredi de fin janvier 1992, la marmite explose sur fond de convocation au tribunal du président Jacques Larqué. Il n’est pourtant pas encore question de dépôt de bilan mais seulement d’une plainte de deux apprentis du centre de formation pour salaires impayés. Et, par ricochet, ceux des 19 apprentis pour une somme à valoir de 1 200 000 francs sur un budget total du club de 17 millions de francs. La machine judiciaire est en marche et révèle les soupçons de rumeur : le déficit abyssal du club. Perquisition ; inculpation de Jacques Larqué avec interdiction d’exercer comme président ; subvention de la Région (1 500 000 francs) retirée au dernier moment par le Président de Région et maire de Rodez Marc Censi, conscient de la situation financière du club. Tout va très vite jusqu’à ce comité directeur extraordinaire qui valide, le 4 février 1992, par la voix des deux dirigeants Bernard Couderc et Jean-Paul Viguier, l’énorme passif de 6 millions de francs, désormais bien éloignés des 1 200 000 francs dus aux apprentis. Le club vacille. Un dirigeant, Joël Pilon, directeur du supermarché Leclercq, prend cependant son bâton de pèlerin pour tenter de sauver ce qui peut l’être encore. Avec succès, il obtient le déblocage de la subvention Région ; négocie la dette sur cinq ans avec le Crédit Agricole ; obtient de plusieurs joueurs la réduction de leurs salaires et se séparent des plus gros (« la légion yougoslave » notamment) pour la saison 92-93 à la demande de la DNCG. A cet instant, une question brûle toutes les lèvres : le professionnalisme est-il viable à Rodez ?
2- Dépôt de bilan
Pour la saison 92-93, le club repart en division 2 avec un effectif amoindri par de nombreux départs. Pour conduire la destinée du club, un nouveau président, Jean-Paul Viguier et Michel Poisson toujours à la barre pour le côté sportif. Mais le club n’en a pas fini avec les démêlés judiciaires et financiers. Un second coup est porté au club, en janvier 1993, par un rappel de l’URSSAF pour des impayés d’1,5 million de francs portant sur les saisons 89-90 et 90-91. Pour ne rien arranger, le principal sponsor du club, Leclercq, décide de se retirer sur fond de désaccord politique avec le Président du Conseil général, ce dernier ayant refusé le transfert du magasin Leclercq vers la zone de Sébazac. Pris à la gorge, le club, par la voix de son Président, dépose le bilan le 1er février 1993. Le déficit s’établit entre 6 et 9 millions de francs. Des subventions exceptionnelles sont votées par les collectivités pour sauver ce qui peut encore l’être. Insuffisamment ! Un administrateur est nommé qui évite la liquidation judiciaire. Sportivement, le club termine à la quatorzième place mais ne peut éviter une rétrogradation administrative imposée par la Fédération. Le club retombe pour la saison 93-94 en Nationale 2. Avec des changements notables : exit le Stade Rodez football remplacé par le Rodez Aveyron Football au cours de l’été 1993. Surtout Michel Poisson quitte le navire ruthénois, remplacé par Daniel Périault. Quant aux joueurs, il ne reste de l’équipe demi-finaliste de la Coupe de France que les seuls Guitard, Pasturel et Bobek, tous les trois joueurs emblématiques du club. Les autres se sont envolés vers des cieux peut-être plus cléments.
3- Un déficit récurrent
Entre 1994 et 1998, année où le club retrouve le CFA, le RAF tangue entre résultats en dents de scie et déficit chronique. L’heure est à l’austérité. Avec des collectivités de plus en plus frileuses pour éponger les déficits. Le retour au professionnalisme n’est plus de circonstance. Les nouveaux présidents, Bernard Charrier d’abord puis Jean-Pierre Martel, doivent faire avec les moyens du bord. Pourtant, malgré tous leurs efforts, le déficit ne cesse de s’alourdir, grimpant de 294 958 francs en juin 1994 à 700 000 francs en juillet 1996, obligeant le club à baisser son budget de 4,5 millions à 3 millions de francs. Pire encore, en décembre 1996, le déficit cumulé s’élève à 924 000 francs. Côté public, le RAF fait de moins en moins rêver avec un public en baisse lors des matches (6086 spectateurs pour la saison 96-97) Le club, pourtant, remonte en Nationale I à l’issue de la saison 95-96 mais vit dans l’instabilité sportive avec la valse d’entraîneurs : 5 (Daniel Périaul ; Jean-Luc Vinuesa ; Jacky Novi ; Michel Poisson de retour au club pour une saison et Frédéric Hantz) entre 1993 et 1999.
La tendance commence à s’inverser à partir de la saison 96-97 quand le club annonce un excédent de 331 000 francs, faisant passer le déficit de 900 à 600 000 francs. Pas de quoi non plus construire des châteaux en Espagne avec un budget de 2,77 millions de francs.
4- Et le football dans tout ça ?
Le football, dans la dernière décennie du XXe siècle, se perd dans d’incessantes réformes des championnats. D’abord en 1993 avec une Division 2 à 22 clubs et un Championnat National Fédéral décliné en trois niveaux, le RAF étant alors versé en Nationale 2 pour la saison 93-94. Nouvelle réforme en 1997 avec un National et deux niveaux de championnat amateur (CFA1 et CFA2), le RAF étant versé dans le CFA1.
Pour sa première année en Nationale 2, l’équipe de Daniel Périault termine troisième mais échoue pour la montée. La saison 94-95 reprend avec le même entraîneur avant d’être remercié en décembre 94 et remplacé par un joueur du club, Jean-Luc Vinuesa. Avec ce dernier, le club termine la saison à la quatrième place, lui valant l’accession en Nationale 1. Le RAF retrouve des couleurs. Pourtant, nouveau changement dans la direction sportive. A l’été 95, c’est un ancien international, Jacky Novi, professionnel de Paris à Marseille et de Nîmes à Strasbourg, qui se retrouve sur le banc. Malgré plusieurs recrues, le club stagne en Nationale 1, terminant onzième puis quinzième. La saison 97-98 voit le retour de Michel Poisson, Jacky Novi étant parti entraîner Fréjus. L’année de trop peut-être pour le mythique entraîneur qui ne peut faire mieux que quatorzième à l’issue de la saison. Un échec qui incite le président Charrier à congédier Poisson pour le remplacer par le défenseur du RAF, Frédéric Hantz, qui débute là une carrière d’entraîneur.
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