X- Petit abécédaire effrayant

Acomme…

 Assises, Cour d’

L’affaire du siècle a éclipsé tout ce qui remplit d’ordinaire les cours d’assises : parricides, infanticides, incestes ou viols. Une criminalité accompagnant des mobiles plus courants : jalousie, appâts du gain ou querelles de voisinage.

Une Cour d’Assises de l’Aveyron réputée tout au long du XIXe siècle pour sa sévérité. En 1817, 18 condamnations à mort sont prononcées dont les cinq de l’affaire Fualdès. De 1811 à 1860, pas moins de 144 accusés sont condamnés à mort, la seconde partie du XIXe siècle atténuant cette peine (15 condamnations entre 1861 et 1910). Ce qui fait dire au président de la Cour d’Assises de l’Aveyron en 1855 : « L’Aveyron est particulièrement féconde en crimes de toute nature et surtout en attentats contre les personnes… »

Enfin, sur les 171 condamnations à mort qui s’échelonnent de 1811 à 1936, 66 sont exécutées dans le département dont la dernière remonte au 4 avril 1936.

Bcomme…

 Bancal (famille)

Que n’a-t-on pas dit sur cette famille et sa moralité dépravée. Catherine Bancal, la mère, transformée en mégère et en tenancière de bordel par la presse et l’iconographie si abondante dans l’affaire Fualdès. Pire même, louant la chambre de sa fille à des adultères de passage. Le père Bancal, insignifiant bonhomme, maçon à ses heures agrémentées de quelques petits travaux annexes, qui se suicidera dans sa cellule. Et les cinq enfants. Marianne et Magdeleine, les filles… L’aînée, 19 ans, sera inculpée. La cadette, âgée de 9 ans, déposera au gré des interrogatoires et de son imagination. Que ne ferait-on pas dire à une gamine de neuf ans. Comme à ses trois frères Jean, Alexis et Victor, trois garçons en bas-âge. Leurs témoignages sur la scène du crime seront déterminants dans l’instruction de l’affaire puis lors du procès.

 Bastide-Gramont, Bernard-Charles

Quelle part de vérités doit-on garder dans les témoignages à charge qui vont accabler Bastide et le conduire jusqu’à l’échafaud ? Bien difficile à dire. L’homme est dit violent, menaçant son propre père ou des propriétaires récalcitrants. Les 19 et 20 mars, il est vu en de multiples lieux de Rodez mais les horaires se contredisent. Propriétaire du domaine de Gros, à quelques kilomètres du chef-lieu, il est marié avec la sœur de Jean-Joseph Jausion. Une relation qui va précipiter la justice vers l’agent de change. Enfin, sa grande taille, relevée par des soi-disant témoins du crime, fera de lui le chef de la bande.

 Besses (Côte et moulin)

En haut de la rue Saint-Cyrice, au départ de la M.J.C., la terrible côte des Besses dévale le piton ruthénois jusqu’aux berges de l’Aveyron, là où est retrouvé le corps flottant de Fualdès. Le sordide cortège a-t-il emprunté le tour de ville à partir de la place d’Armes ou, par un chemin plus court et moins exposé aux regards, a-t-il descendu la rue de Bonald pour parvenir à hauteur de la côte des Besses ? Le moulin des Besses a disparu à la différence de celui, voisin, des Attizals.

 Ccomme…

 Calvet

Cet ancien révolutionnaire de Mur-de-Barrez est condamné une première fois sous l’Empire à 5 ans de prison pour escroquerie à la conscription avant de subir une nouvelle peine de 5 ans pour injures envers des royalistes à l’époque de la Restauration. C’est lui qui, en cellule, sert de mouton de service pour faire parler Bousquier contre Bastide le 28 mars 1817. En échange d’une réduction de peine ? Il n’aura pas le temps d’en profiter. Il meurt en prison le 23 avril 1817

 Chevaliers de la Foi

Par prudence mais aussi par goût du mystère, les sociétés secrètes conservent rarement des documents susceptibles de compromettre ses membres. Les Chevaliers de la Foi, fondés par Berthier de Sauvigny en 1809, n’échappent pas à cette règle de l’omerta. Et seules les Mémoires de son fondateur, ajoutées aux souvenirs personnels de ses membres, permettent d’en connaître les règles et les actes.

Exécrant la Révolution et partisan d’un retour à l’absolutisme, Berthier de Sauvigny organise sa société sur le modèle de la franc-maçonnerie. Quand l’Empire s’effondre sous les coups de boutoir des puissances étrangères, il planifie une insurrection dans le Midi, qui doit ensuite rayonner sur tout le territoire. Le lieu fixé sera le Rouergue, cette petite Vendée peuplée de fervents partisans. Des troupes venues de Toulouse, auxquels se joindront des prisonniers enfermés à Rodez, participeront à cette insurrection.

En Aveyron, comme sur l’ensemble du territoire, le retour des émigrés se conjugue avec la Terreur blanche. Celle, feutrée, qui révoquent ceux qui, comme Monseignat, Boyer ou Sasmayous, se sont compromis sous la Révolution. Celle, légale, qui consiste à créer une Cour prévôtale dont le président, en Aveyron, n’est autre qu’Enjalran, un royaliste, père de Clarisse Manzon. Celle, enfin, violente, qui consiste à éliminer les plus fervents Républicains.

Peu d’informations percent sur les membres et les actes des Chevaliers de la Foi dans le département. Quelques noms ressortent comme ceux des frères Goudal de la Goudalie, du marquis de Bournazel, d’Alexandre de Mostuéjouls, du chevalier de Marcillac et de l’abbé Marty, co-fondateur de la Congrégation de la Sainte-Famille avec Emilie de Rodat. Même si aucun document ne vient l’attester, les noms d’anciens nobles comme René de Bonald ou Bancalis de Pruynes ne peuvent être exclus.

Clémendot, Jean-Baptiste

Il est l’amant-traitre qui dévoile à son supérieur, le général de Vautré, les confidences de Clarisse Manzon. Bien difficile à estimer son véritable rôle dans l’affaire. Quoi qu’il en soit, ses révélations font basculer l’affaire, expliquant sa mutation peu de temps après. Eloigné de l’Aveyron, Rodez n’entendra plus parler de lui.

Complainte

La plus célèbre complainte de toute l’histoire criminelle relève elle-aussi du mystère. Attribuée à M. J., limonadier à Toulouse et intitulée « Véritable complainte, arrivée de Toulouse au sujet du crime affreux, commis à Rhodez, sur la personne de l’infortuné Fualdès… », publiée à Paris en 1818, elle serait en réalité l’œuvre d’un trio composé de l’avocat Berryer, du chansonnier Désaugiers et du dentiste Catalan (Jean-Louis Salomon Cougnard en réalité journaliste) rédigée lors d’un repas à Paris. Deux autres complaintes de l’époque existent sur l’affaire Fualdès : « Nouvelle complainte, arrivée de Rhodez, relative à l’hommicide affreux commis dans cette ville sur la personne de l’infortuné Fualdès » par M. Lalettre, limonadier à Rhodez et « La vérité sur l’assassinat de M. Fualdès, les ébats de ce fameux procès, et la condamnation des coupables… ou récit envoyé par un témoin d’Albi à son correspondant à Paris », 1818.

Par la suite, d’autres complaintes attribuées à l’affaire Fualdès voient le jour. C’est dire son succès tout au long du XIXe siècle au point que son « air du Maréchal de Saxe », est repris dans diverses complaintes criminelles.

 Complot

Au début de l’année 1814, les armées étrangères sont aux frontières de la France. Le temps pour les Chevaliers de la Foi de passer à l’action. Date est prise pour le 17 février 1814, au château de la Goudalie, à quelques kilomètres au nord de Rodez, chez les frères Hippolyte et René Goudal. Ils savent compter sur les complicités de la Garde nationale, sur la brigade de gendarmerie qui leur ouvrira sa porte ainsi que des soutiens affirmés du sous-préfet de Villefranche-de-Rouergue Louis Cruzy de Marcillac et du maire de Rodez Joseph-Régis Delauro, tous les deux membres des Chevaliers. Seul, le baron de Trémont, préfet de l’Aveyron, est censé leur être hostile mais c’est un homme de peu d’envergure qui suivra en fonction des événements.

Deux cents hommes mal armés, pour la plupart des mercenaires recrutés par soldes, se réunissent à la Goudalie. L’insurrection est imminente mais au dernier moment, Berthier de Sauvigny décide d’annuler son plan, dispersant ses troupes dans la nuit alors que l’alerte est donnée à Rodez, suite aux révélations d’un indicateur, Bastide, propriétaire du domaine de Dalmayrac, jouxtant celui de la Goudalie. Aussitôt, le procureur Fualdès rédige une note au préfet et au colonel Delafond : « Les notables, écrit-il, seront égorgés, les fonds publics pillés, les prisonniers libérés. »

L’échec consommé, il reste toutefois à régler le paiement des volontaires. 25 000 francs représentent une somme considérable qu’aucun des conjurés ne possède. Noblesse et brigandage feront donc cause commune. Question d’honneur et de cause nationale.

Tous les dix jours, une patache transportant les fonds publics quitte Espalion pour Rodez. Le 1er avril 1814, à proximité du château de Vayssettes, à huit kilomètres de la Goudalie, six à huit hommes décidés lui barrent le passage. La fusillade est brève mais un gendarme reste au sol, mortellement blessé. 22 030 francs s’envolent dans la nature. C’est approximativement la somme que les conjurés doivent se procurer pour rembourser leur dette.

Le procureur Fualdès n’a pas le temps de diligenter l’affaire. Le juge Teulat et le capitaine de gendarmerie Aubriot, en charge de l’instruction, laissent traîner l’enquête. Le 12 mai, Louis XVIII entre dans Paris. Fualdès est dépossédé de ce dossier encombrant. Le 2 septembre 1816, 22 845 francs se volatilisent chez le maire d’Espalion Costes, royaliste convaincu tout comme le sous-préfet d’Espalion Lastic de Saint-Jal, membre des Chevaliers de la Foi. Le hold-up provoque la colère de la population espalionnaise qui y voit la main des ultras. D’autant plus que l’enquête se porte sur quatre notables espalionnais hostiles au régime. Epurées de leurs principaux indices, après maintes péripéties politico-judiciaires, les deux affaires se terminent par un double acquittement, le 31 décembre 1817 et le 12 mars 1818.

 Cour d’assises

Elle se réunit dans le couvent des Cordeliers, détruit en 1834 au profit du nouveau tribunal. Un acte de barbarie patrimoniale. Pour accueillir les 243 témoins à charge, les 77 à décharge, magistrats, jurés et public, des aménagements sont nécessaires, divisant la salle en trois parties distinctes. Au fond, une galerie supérieure est destinée aux femmes. Au centre du prétoire, le public formé d’artisans, boutiquiers, propriétaires et bourgeois. Côté opposé, les sièges supérieurs des membres de la Cour et du parquet, des sièges pour les jurés, des bancs des accusés placés en face des jurés, des nombreux bancs réservés aux témoins ainsi que de nombreuses places réservées aux personnalités politiques, religieuses et administratives.

 Cour prévôtale

Juridiction d’exception, créée dans chaque département par la loi du 20 décembre 1815, au moment de la Terreur blanche. Composée d’un président, de quatre magistrats et d’un prévôt militaire, cette cour juge sans appel ni grâce les actes de sédition et de rébellion armée à l’égard de la monarchie mais aussi certains crimes comme le vol, le faux monnayage, la contrebande… A l’époque de l’affaire,  le juge Enjalran préside la cour prévôtale avant d’être dessaisi, sa fille Clarisse Manzon étant entendue comme témoin lors du procès de Rodez.

 

Dcomme…

 

Decazes, Elie (Duc)

Eminence grise de Louis XVIII, Elie Decazes préconise un régime libéral basé sur la pondération, la liberté et la réconciliation. Ce que n’admettent ni les ultras, partisans de la Terreur blanche, ni les Républicains nostalgiques de 1793, ni les Bonapartistes qui considèrent que Decazes a trahi l’Empereur à son retour de l’île d’Elbe. Préfet de police à Paris, il devient ministre de la Police puis de l’Intérieur. C’est à ce moment-là qu’éclate l’affaire Fualdès. A ce titre, il s’intéresse de près au cheminement judiciaire, lui-même soupçonnant les ultras d’avoir fomenté le crime.

 

Delauro, Joseph-Régis

Né en 1778, maire de Rodez de 1813 à 1824, député de l’Aveyron de 1815 à 1816 dans les rangs des ultras puis de 1820 à 1831 dans la majorité ministérielle, cet ultraroyaliste joue un rôle majeur dans la vie politique du département durant la fin de l’Empire et au début de la Restauration. Et donc dans l’affaire Fualdès. A ne pas confondre avec son presque homonyme Jean-Joseph Delauro-Dubez, président du tribunal criminel de l’Aveyron, conseiller à la cour de Montpellier, révolutionnaire athée devenu croyant à la fin de sa vie, auteur d’un livre posthume : « Aux incrédules et aux croyants. L’athée redevenu chrétien ».

 

Ecomme…

 

Enjalran, Edouard

Il est curieux de constater que le frère de Clarisse Manzon, Edouard Enjalran, se marie avec une Elisabeth Bancal sans qu’il n’y ait apparemment aucune relation parentale avec les Bancal de l’affaire.

 

Estourmel, comte d’

Originaire de Picardie, démissionnaire de la sous-préfecture de Château-Gonthier durant les Cent Jours, sa fidélité à Louis XVIII lui vaut d’obtenir le poste de préfet de l’Aveyron, le 12 juillet 1815. Jusqu’à son départ pour la préfecture de la Sarthe en juillet 1818. Outre l’affaire Fualdès, dans laquelle il joue un rôle majeur, sensible aux questions hygiéniques, il crée à Rodez des chantiers de charité, notamment sur les boulevards, permettant une meilleure aération de la ville.

 

Exécution

Elle se déroule à Albi, place du Manège, le 3 juin 1818, en plein après-midi. Jausion, le premier, monte au supplice avec résignation. Puis vient Collard que les bourreaux du Tarn et de l’Aveyron doivent porter comme un agonisant. Bastide monte en dernier. Quant à Bach et Catherine Bancal, la Cour de cassation a sursis à exécution, le 30 mai.

 

Fcomme…

 

Feydel, Antoine, Joseph de

Conseiller à la cour royale de Toulouse, il préside les débats lors du second procès à Albi.

 

Fualdès, Antoine Bernardin

L’homme par qui l’affaire est arrivée ! A ses dépens ! Né d’une lignée de notaire du Carladez, des études de droit le poussent à embrasser la même carrière à Mur-de-Barrez. Epousant les idées de la Révolution, membre actif de la municipalité constitutionnelle, Fualdès se retrouve membre du tribunal criminel extraordinaire de l’Aveyron durant la Terreur. Il vote la mort de Charlotte Corday mais s’oppose à celle du général Custine. Il ne siège pas, comme il a été écrit, lors de la condamnation de Louis Capet.

Ne se sentant plus en sécurité à Paris, il retourne à Mur-de-Barrez avant de s’installer, au début de l’Empire, à Rodez comme substitut du procureur puis accusateur impérial au criminel. En 1815, avec la première Restauration, Fualdès perd son poste. Entretemps, il est entré au conseil municipal du chef-lieu et devenu vénérable de la Loge « La Parfaite Union ».

 

Fualdès, Didier

Fils d’Antoine Bernardin Fualdès et de Marianne Bertrand dont il est le seul héritier et descendant, ses frères et sœurs étant décédés en bas-âge. Au moment de l’affaire, Didier Fualdès est âgé de trente ans. Il vit avec son épouse à Lentat (Cantal) où il exerce la fonction d’avocat. Le meurtre de son père bouleverse sa vie, tant moralement que financièrement, le fils devant répondre des créances de son père. Fuyant la région, il s’installe à Paris où il crée un cabinet d’affaires.

 

Gcomme…

 

Géricault

La peinture, hormis les 150 gravures contemporaines de l’affaire, doit à Géricault sept dessins, conservés au musée du Louvre, au musée des Beaux-Arts de Rouen, au palais des Beaux-Arts de Lille et dans la collection privée Louis-Antoine Prat. Des dessins restés à l’état d’ébauches à la différence du « Radeau de la Méduse » que Géricault peint à la même période.

 

Goudal de la Goudalie, Pierre-Antoine et René

Issus d’une vieille famille de la noblesse rouergate, fils de Jean-Pierre Martin de Goudal, seigneur de La Goudalie, les frères Goudal, Pierre-Antoine et René, sont toujours restés dévoués à la royauté, le premier étant même fait chevalier de Saint-Louis en 1814. Les deux frères (sans doute membres des Chevaliers de la Foi) organisent le complot dit de la Goudalie visant à faire couronner Louis XVIII dans la cathédrale de Rodez (Voir à Complot). Célibataires, sans descendance, ils vendent le château et le domaine au maire de Rodez Delauro.

 

Gros

Sur la commune de Sainte-Radegonde, entre le pont de la Rouquette (route de Sévérac) et Agen d’Aveyron. En 1817, le domaine (262 hectares) est propriété de Charles Bastide-Gramont avant d’être vendu aux enchères, le 4 décembre 1819, suite à l’exécution de Bastide, à Joseph-Antoine Durand (dit Durand de Gros). Ce dernier le développe en introduisant des méthodes fouriéristes pour en faire, avec le domaine d’Arsac voisin, l’une des plus modernes exploitations agricoles du département.

 

Hcomme…

 

Hebdomadiers

Aujourd’hui rue Séguy, du nom de l’académicien et  prédicateur du Roi, Joseph Séguy. La rue est débaptisée le 18 novembre 1879 par le conseil municipal de Rodez. Sans doute en raison de sa triste réputation. C’est au début de cette rue, face au chevet de la cathédrale, que sont retrouvés la canne à pommeau de Fualdès et un mouchoir aux initiales A.B., attribué à Anne Benoit. Des objets perdus lors de l’enlèvement ou posés sciemment à cet endroit ? Mystère ! Le terme « Hebdomadiers » se rapporte aux prêtres chargés à tour de rôle d’un service religieux hebdomadaire.

 

Hypothèse

Les deux procès de Rodez puis d’Albi conclurent à la culpabilité de Bastide, Jausion et Collard et à la complicité de Bach, Bousquier, Missonnier, Anne Benoit et Catherine Bancal, le mobile du crime étant la cupidité. Reste que l’erreur judiciaire fut rapidement mise en avant, suscitant de nombreuses autres hypothèses, certaines complètement farfelues, d’autres reposant sur un long travail d’archives. C’est ainsi que furent évoquées : le meurtre par un galérien désireux de se venger du procureur ; la main des francs-maçons ; un rendez-vous galant qui se serait mal terminé ; une mauvaise rencontre dans les rues obscures de la ville. Ce n’est qu’au début du XXe siècle, avec l’ouverture des archives de l’affaire, que l’historien Combes de Patris évoqua la thèse du complot ultraroyaliste des Chevaliers de la Foi. Une hypothèse reprise plus tard par Charles Yence, descendant du notaire accusé lors du troisième procès de l’affaire. Hypothèse séduisante il est vrai, reprise aujourd’hui par la plupart des historiens mais qui ne repose que sur des suppositions, l’implication de la société secrète des Chevaliers n’étant prouvée par aucun document.

 

Jcomme…

 

Jausion, Jean Joseph

Ami de Fualdès, beau-frère de Bastide, hébergeant une autre sœur de Bastide, veuve, autant de liens qui amènent Jean Joseph Jausion à offrir sa tête au bourreau. Pourtant, jusqu’à l’affaire, l’agent de change fait partie des notables de la ville. Parfaitement considéré quoique sans doute jalousé pour sa réussite. Lui qui avait été désigné par les négociants de la ville comme banquier de la bourse de commerce créée en 1804.

Une sombre histoire avait terni sa réputation au début des années 1810 quand il avait été soupçonné d’avoir commis un infanticide avec la complicité de sa maîtresse Marie Fraisse. Des racontars et des mensonges qui jouèrent pourtant un rôle dans la décision des jurés de Rodez et d’Albi.

 

Juin de Siran

Originaire de l’Hérault, il est, au moment du procès, procureur général du Tribunal de Rodez. Fervent royaliste, il est membre des chevaliers de Saint-Louis et probablement proche des Chevaliers de la Foi.

 

Lcomme…

 

La Goudalie. (Voir à Complot et à Goudal)

 

Laqueilhe (famille)

Antoine Bernardin Fualdès est le créancier du père Laqueilhe qui se trouve lui-même en prison à Espalion pour dettes. Ses trois fils peuvent en vouloir au procureur de ne pas s’acquitter de sa créance. Or, l’un des trois fils Laqueilhe est vu à Rodez le 19 mars. Il n’en faut pas plus pour les appréhender avant de les relâcher, chacun possédant un alibi.

 

La Salle, chevalier de

Juge instructeur à la cour prévôtale, il conduit l’enquête, s’acharnant à désigner Jausion comme complice de Bastide. En avril 1817, il estime l’instruction close, renvoyant les accusés devant la cour d’assises.

 

 Latouche, Henri de (Voir à Thabaud Hyacinthe)

 

Littérature

Chacun connaît la part important prise par les articles des sténographes parisiens durant l’enquête et tout au long des trois procès. Une prose qui contribua à influencer l’opinion publique et le verdict final. Les années passant, la ville retrouvant sa quiétude, la littérature de l’affaire Fualdès aurait pu s’estomper. Mais la persistance du mystère, les soupçons d’erreur judiciaire aussitôt après la triple exécution et les rétractations des principaux acteurs du drame incitent magistrats et historiens à tenter de lever pour le moins, un coin du voile, au plus, de résoudre l’énigme pesant sur le crime.

L’ensemble des ouvrages traitant de l’affaire Fualdès sont publiés au XXe siècle. « Un grand mystère judiciaire, l’affaire Fualdès » paraît en 1914 sous la plume de l’historien Bernard Combes de Patris. L’auteur évoque pour la première fois le rôle des Chevaliers de la Foi dans le meurtre du procureur à partir de la lecture minutieuse des minutes du procès et de documents personnels. Toutefois, le parti pris royaliste de l’auteur, monarchiste convaincu,  altère la bonne compréhension de l’histoire.

En 1922, Armand Praviel publie « L’Assassinat de M. Fualdès » dont le sous-titre « Roman vécu » laisse transpirer un choix résolument imaginatif sur fond de vérités historiques. Le troisième ouvrage, paru en 1934, « La Justice enchaînée. Affaire Fualdès » est rédigé par Léo Creissels. Si l’erreur judiciaire est clairement exposée, l’auteur n’évite pas le piège qui consiste à mêler l’affaire Fualdès à celle de Louis XVII et des nombreux faux dauphins dont Naundorff. Aujourd’hui, tests A.D.N. à l’appui, il est prouvé que Louis XVII est bien mort, emmuré, dans la prison du Temple, que Naundorff était bien un usurpateur et que Fualdès ne pouvait en aucun cas posséder des documents compromettants sur une affaire qui était sans fondement.

La seconde moitié du XXe siècle voit la parution de quatre ouvrages : celui d’Emile Rual en 1970 intitulé « L’Affaire Fualdès » ; la bande dessinée, première du genre, de Paul Astruc en 1984 « Fualdès ». L’ouvrage « La Rumeur de Rodez » très documenté et précis en 1991 de Pierre Darmon qui dresse, à la lumière de l’affaire Fualdès, « un tableau des mœurs provinciales du début du XIXe siècle et une étude sur la justice de la Restauration ». L’année suivante paraît « La Rumeur et le meurtre » de N.L. Rouquette.

En 1999, l’historien Philippe Méraux publie « Clarisse et les égorgeurs ». Ses recherches, s’appuyant sur des correspondances inédites de la famille Carrère, ne manquent pas d’intérêt dans le désir de développer une nouvelle thèse sans pour autant apporter de preuves tangibles à sa démonstration. Fualdès aurait descendu la rue de Bonald, entraîné par ses kidnappeurs chez le bourreau de Rodez, logeant au bout de la rue de la Bullière, qui l’aurait fait passer de vie à trépas avant d’être transporté puis jeté dans l’Aveyron. L’idée est séduisante mais ne confirme en rien la phrase publiée en quatrième de couverture de l’ouvrage : « Philippe Méraux élucide enfin une affaire… »

L’affaire Fualdès a aussi servi de cadre à différentes thèses de droit, à de nombreux articles parus dans les revues et journaux, notamment dans La Revue du Rouergue ainsi que de la plupart des ouvrages consacrés aux grandes affaires criminelles.

Pour le bicentenaire de l’affaire, le musée Fenaille à Rodez lui a consacré une grande exposition à partir de pièces authentiques et souvent jamais montrées, éditée ensuite dans un ouvrage de référence : « La rumeur et le meurtre ».

 

Loge maçonnique

Le fait que Fualdès soit le vénérable de la loge « La Parfaite Union » à l’heure de son assassinat ne peut qu’interroger sur le rôle que joue la maçonnerie à Rodez depuis sa création sans toutefois ne rien préjuger sur son implication dans l’affaire.

Si l’on se réfère à des signes distinctifs de la maçonnerie portés par les frères sur des actes administratifs ou notariaux, la présence de francs-maçons à Rodez remonterait à la première moitié du XVIIIe siècle. Un document, retrouvé à la Bibliothèque nationale, collection Chapelle, émanant du Grand Orient de France, évoque une loge à Rodez entre 1744 et 1749. Une présence attestée par une lettre du 25 avril 1757 adressées par le chevalier de Firmy à un maçon de Rodez.

Le 19 juin 1762, la loge Saint-Jean est fondée à Rodez, composée de notables et d’ecclésiastiques influencés par les idées des Lumières. A cette loge se substitue, le 3 août 1789, « La Parfaite Union », fondée par Jacques Boyer, autour de vingt et un maçons, majoritairement  des petits bourgeois favorables aux idées libérales parmi lesquels Sasmayous, ami de Fualdès, les imprimeurs Carrère et Devic, Richard, futur fondateur de la première bibliothèque municipale de Rodez, Rodat ou Monseignat… dont le principal orateur est le capucin Chabot, futur conventionnel.

Au fil des années, leur nombre ne cesse de croître, passant de 38 en 1790 à 67 en 1803 puis à 84 en 1805. Au point que le 17 avril 1794, en dépit du décret de la Convention concernant la dissolution des ateliers maçonniques, la loge achète l’immeuble de la rue Saint-Pierre le Doré (actuelle rue Cusset) pour en faire son siège et son lieu de réunion, ouvert au public sous la forme d’un café. La Maison des Maçons est alors financée par la quote-part apportée par différents frères de la loge. L’immeuble sera vendu le 19 décembre 1856. Cinq mois plus tôt, le 7 juillet 1856, la Parfaite Union s’est porté acquéreur d’un immeuble rue Saint-Just, appartenant ensuite au Cercle Républicain.

L’implication des frères dans la Société populaire et au sein du Conseil général de la commune de Rodez lors des événements révolutionnaires apparaît peu importante avant de jouer un rôle primordial dans les instances municipales sous le Consulat puis l’Empire. En 1803, sur 33 conseillers ruthénois, 14 sont des francs-maçons.

Sous l’Empire, les relations à l’intérieur de la loge entre anciens révolutionnaires et royalistes s’enveniment au point de provoquer deux scissions. En 1810, 50 des 80 maçons, parmi lesquels Fualdès et Monseignat, fondent la loge des « Amis réunis » avant de réintégrer la Parfaite Union. Cinq ans plus tard, 53 frères sont exclus.  Ceux qui restent, parmi lesquels Fualdès et Monseignat, représentent l’aile républicaine. Fualdès est élu vénérable.

Le 2 février 1816, quelques semaines avant l’assassinat de Fualdès, la loge est dissoute par le préfet d’Estourmel, sur ordre du ministre de la Police, suite à un courrier de l’ultra-royaliste Clausel de Coussergues, dénonçant les agissements subversifs de plusieurs membres de la loge. La loge se reconstituera ensuite en 1818.

Le rôle joué par la franc-maçonnerie dans la vie politique ruthénoise apparaît donc clairement en même temps que les rivalités s’accroissent au fil des événements entre anciens révolutionnaires comme Fualdès et J. Cabrol, républicains modérés menés par Monseignat et ultra-royalistes autour de Delauro, maire de Rodez durant la Restauration. Sans pouvoir vraiment dire si ces rivalités ont un rapport avec l’assassinat de l’ex-procureur.

 

Mcomme…

 

Maison

La rue des Hebdomadiers (actuelle rue Séguy), à quelques claquements d’ailes de chauve-souris de la cathédrale, s’inscrit dans ce vieux Rodez aux rues étroites et sombres, composée d’hôtels particuliers, de commerces de bouche et de petits entrepôts, située entre la place de la Cité et l’hôtel de la Préfecture (actuel évêché). Une voie pas plus mal famée que d’autres, qui doit son nom aux prêtres assurant un service religieux hebdomadaire à la cathédrale. C’est d’ailleurs l’un de ces religieux, Guibert, qui est propriétaire du N°605 au milieu du XVIIIe siècle. Lors de la vente des Biens nationaux, Guillaume Bourguet, chirurgien de son état, s’en porte acquéreur pour 2950 livres. Etrangement, c’est lui qui, plus tard, expertisera le cadavre de Fualdès.

Après avoir été exhaussée d’un étage, la maison est revendue le 29 novembre 1794 pour 6000 livres à Jean-Antoine Sénegean, boucher, qui la donne ensuite en héritage à son gendre Vernhes qui exerce la même profession. C’est lui qui est propriétaire du N°605 au moment de l’affaire, louant rez-de-chaussée et étages. La famille Bancal y entre le 1er juillet 1816 mais le loyer étant trop élevé, elle prévoit de donner congé à la Saint-Jean 1817. Entretemps, le meurtre a été consommé faisant de ce lieu, la maison du crime.

Devenue l’horrible maison Bancal, objet de terreur dans toute la ville, son propriétaire Vernhes demande durant l’instruction de l’affaire des dommages et intérêts au Bancal, ce que lui refuse le tribunal de Rodez, le 6 octobre 1817, sous le prétexte « qu’en supposant même qu’il ait été causé un dommage réel à ladite maison, les demandeurs auraient à s’imputer d’avoir baillé leur maison à loyer à des gens sans aveu, sans fortune, dont la conduite passée et les excès journaliers prélude de l’horrible assassinat dont ladite maison a été le théâtre, devaient faire naître chez lesdites parties le pressentiment de quelques sinistre événement ».

En clair, les Bancal portent bien avant le crime, le fardeau de leur triste réputation et le masque du crime.

Plusieurs locataires habitent la maison Vernhes, des époux Saavedra à Anne Benoit, son amant Jean-Baptiste Collard en passant par le couple Rose et Antoine Palayret, les dames Bedos et Ducos

Deux estampes et trois plans, présentés durant le procès afin de permettre aux magistrats et aux jurés de visionner les lieux aux regards des témoignages, permettent de se faire une idée du lieu, composé d’un rez-de-chaussée, de deux étages et d’un chien assis s’ouvrant sur le grenier.

La maison, dont la sinistre réputation franchit le XIXe siècle, subit le sort de ces lieux que la mémoire publique tente d’exorciser en la détruisant. Sans faire l’objet d’une éventuelle préservation, ni même de quelques clichés à l’exception d’une photo parue dans La Dépêche, elle est détruite en décembre 1962 par l’entreprise Bories afin d’y installer une annexe du magasin Prisunic, au 8 de la rue Séguy. Centre Presse, à son tour, y consacre un article, le 21 décembre 1962. Rayée de la géographie ruthénoise, la maison Bancal ne semble plus qu’appartenir à un passé sans visage quand, en 2011, elle ressuscite au musée Fenaille sous la forme d’une maquette réalisée en 1820, redonnant vie à ce lieu maudit.

 

Manzon, Clarisse

L’égérie de l’affaire. L’énigme de l’énigme. Ainsi peut-on définir la fille du président de la prévôté de Rodez, le juge Enjalran. Qui était-elle vraiment ? A-t-elle été manipulée par les autorités judiciaires ? A-t-elle tout inventé de sa présence chez les Bancal par vengeance ou tout simplement par goût de l’intrigue et du sensationnel ? Bien malin qui pourrait le dire. Pas plus aujourd’hui qu’à son époque où ses jeux de scène lors des deux premiers procès influencèrent les jurés et provoquèrent la colère des autres accusés. Sans parler de ses nombreuses publications, véritable succès d’édition à travers toute l’Europe. Son fils unique lui ayant été retiré, elle monte à Paris où elle vit d’une pension de l’état avant de se rétracter sur son lit de mort en 1825.

 

Mainier, Ignace

Ce légitimiste prononce l’acte d’accusation au procès de Rodez, le 12 juin 1817. Conseiller municipal de Rodez, puis adjoint, il devient maire de Rodez en 1824 en remplacement de Delauro.

 

Médiatisation

Télévision et radio se sont à diverses reprises intéressées à planter le décor de l’affaire Fualdès. Le 13 mai 1958, Claude Barma et Pierre Desgraupes présentent, dans le cadre de l’émission « En votre âme et conscience », « Les Traditions du moment ou l’affaire Fualdès ». En 1977, Pierre Bellemare s’installe au pied de la cathédrale pour évoquer l’affaire Fualdès dans « De mémoire d’homme », précédé d’un téléfilm. Pierre Bellemare croit-il que deux heures d’émission vont effacer cent soixante ans de silence et de mystère ?  La chaise restée vide et la solution, lettre morte, l’émission fait chou blanc, déclenchant l’ire et l’ironie de la Commission du Vieux Rodez, une fois les journalistes repartis vers d’autres aventures : « Comme pour toutes choses voisinent ceux qui s’y intéressent pour trouver la vérité et ceux qui s’en servent pour se mettre en valeur… M. Bellemare aurait dû faire sienne cette réflexion que certaines villes et certains cœurs ne se prennent pas au pas de charge et sur un air de conquête… Ah ! Trop sérieux gens de Paris ! Vous vouliez trouver rapidement la clef du mystère, comme dans un grand jeu, et malgré les hommes. Il vous fallait du sensationnel, la solution… et pas les hommes… Il fallait bien être lointain de nous pour croire que quelqu’un viendrait s’asseoir sur la chaise. Qui aurait osé ?… »

Le théâtre ne s’est pas abstenu de prendre sa part de l’histoire. La récente pièce « Qui a tué Fualdès ? », jouée à Rodez en 2016 et 2017, écrite par Paul Astruc, est précédée, en 1950, par « L’affaire Fualdès », joué au Vieux Colombier à Paris, sur un texte de Denis Marion, une musique de Georges Van Parys, au sein de laquelle joue Michel Piccoli dans le rôle d’Enjalran.

En 2013, la chaîne Planète diffuse « L’affaire Fualdès » dans sa série « Des crimes presque parfaits ». Enfin, Jacques Pradel, sur RTL, consacre à l’affaire Fualdès une émission dans « L’heure du crime », le 15 mai 2015. Dernièrement, France Inter a consacré à l’affaire Fualdès son émission « La Marche de l’Histoire », le 28 juin 2017 pour le bicentenaire de l’affaire.

 

Missonnier, Joseph

Accusé par Bousquier de s’être trouvé dans la maison Bancal au moment du meurtre, il affirme au contraire avoir été se coucher vers 20 heures, reconnaissant avoir bu auparavant une bouteille en compagnie de Collard, au café de Rose Féral. Considéré comme ne possédant pas toutes ses facultés mentales, il est condamné  à deux ans de prison où il décède quelques mois plus tard à Montpellier.

 

Ncomme…

 

Nuit

Elle joue un rôle primordial dans l’atmosphère de l’affaire. Dans une ville seulement éclairée par quelques lanternes suspendues au-dessus des hôtels, auberges et cafés, il ne fait guère bon se promener après huit heures du soir dans les rues étroites autour de la cathédrale. D’autant plus l’hiver quand la bise glace le piton. Voilà pourquoi, en cette saison, les Ruthénois désertent le pavé des rues et se cloîtrent chez eux.

 

Pcomme…

 

Pierret, Rose

Fille d’un officier de gendarmerie, considérée comme l’une des plus belles femmes de Rodez, Rose Pierret est accusée par Clarisse Manzon comme étant la personne se trouvant chez les Bancal au moment du meurtre. Sans doute une vengeance de la vedette de l’affaire, jalouse de la relation de Rose Pierret avec son ex-amant, le lieutenant Clémendot. Après l’affaire, Rose Pierret monte à Paris pour se produire au café de Montagnes-Beaujon dans le rôle de la belle limonadière. Avant de disparaître de l’actualité…

 

Plan

Plusieurs plans ont été réalisés pour les besoins des procès de Rodez et d’Albi, qui permettent aujourd’hui de bien comprendre les lieux de l’affaire. Celui de la partie de la ville de Rodez, amenant les assassins depuis la maison Bancal jusqu’aux berges de l’Aveyron ; celui du centre historique de Rodez permettant de localiser les habitations des protagonistes de l’affaire ; le plan aussi de la maison Bancal et de celle de Fualdès. Des plans gravés sur ordre des autorités de Rodez et vendus au  bénéfice des indigents de la ville.

 

Préfet (Voir à Estourmel, comte d’)

 

Procès

Pas moins de trois procès sont nécessaires pour juger les accusés de l’affaire Fualdès. C’est dire son importance. Le premier s’ouvre à Rodez le 18 août 1817 et se termine le 12 septembre. Un procès fleuve pour accueillir 243 témoins à charge et 77 à décharge. Pour lequel les spectatrices devaient payer 10 francs l’entrée, reversés aux pauvres de la ville.

Le second procès est délocalisé à Albi. Débuté le 25 mars 1818, il se termine le 4 mai par une quintuple condamnation à mort.

L’épilogue intervient à Alby avec un troisième procès, le 21 décembre 1818, pour Yence, Bessière-Veynac et le commissaire Constans, accusés de complicité de meurtre. Les trois sont acquittés le 15 janvier 1819.

 

Rcomme…

 

Retentissement

Sans aucun doute la première affaire criminelle médiatisée au point de connaître un immense succès populaire, qui ne se départit pas tout au long du XIXe siècle et continuera à susciter interrogations et curiosité de la part des historiens, des juristes et du grand public au siècle suivant. Pour marquer les esprits du temps, une multitude de lithographies et d’estampes sont publiées, accompagnées des articles des sténographes venus à Rodez couvrir l’affaire. Sans compter l’inévitable complainte, la plus célèbre du siècle ; des Mémoires publiés ; des représentations théâtrales et, pour couronner le tout, des protagonistes de l’affaire, comme Clarisse Manzon, Rose Pierret et Bousquier, devenus des vedettes de la vie parisienne en se produisant dans des cafés et des cabinets de cire.

 

Rétractation

Les années qui suivent la triple exécution de Bastide, Jausion et Collard, trois témoins importants se rétractent, avouant avoir menti et n’avoir rien vu ni rien entendu au moment du meurtre. Bousquier, le premier, avoue le 21 septembre 1821 que c’est la peur de mourir sous la guillotine qui l’a conduit à mentir sur sa présence chez les Bancal, innocentant de fait les autres accusés

Le meunier Théron ensuite, le 30 décembre 1821, déclarant qu’il n’a jamais rencontré le funeste cortège descendant la côte des Besses. En 1829, c’est au tour de la veuve Bancal de déclarer dans sa cellule de la maison de détention de Cadillac qu’elle ne sait rien de ce crime et qu’elle a menti à Albi pour sauver sa tête. Plus encore, Clarisse Manzon avoue sur son lit de mort, le 20 juillet 1830, n’avoir jamais été témoin du crime.

 

Rodez

Comment s’organise la vie ruthénoise en 1817 ? Et à quoi peuvent bien aspirer ses habitants au moment de l’affaire Fualdès ? Questions essentielles pour comprendre la rumeur et les réactions qui se répandent en ville dès l’annonce du meurtre.

La composition sociologique des habitants correspond à celle d’une riche cité marchande intimement liée à la campagne environnante. Négociants et notables de fonction (notaires, avocats, magistrats) composent la classe aisée de la ville, propriétaires de terres, de châteaux et de maisons sur le causse environnant et le vallon de Marcillac. A leurs côtés, le petit peuple des gens de peine, des domestiques, des gens de métiers (artisans et commerçants) et, au plus bas de l’échelle, les indigents complètent cette population qui se monte à 6500 individus à l’époque de Fualdès.

Avec la vente des Biens nationaux, les bâtiments des congrégations religieuses changent de mains. La Chartreuse est transformée en haras nationaux ; le couvent des Capucins, en prison ; celui des Jacobins, en caserne…

En 1792, la conscription fait du chef-lieu aveyronnais une ville de garnison. Un statut qu’elle conserve jusque dans l’entre-deux-guerres.

A l’aube de la Révolution, la ville fidèle au roi depuis des siècles épouse largement les idées nouvelles, les libéraux avancés prenant à partir de 1790 le pouvoir municipal à la place des modérés. La ville républicaine s’oppose alors à la  campagne, plus réactionnaire. En 1793, la Terreur divise ceux qui ont adhéré aux idées de la Révolution. Un homme comme le juge Teulat, maire de Rodez en 1791, est montagnard puis royaliste à la fin de l’Empire. En 1817, c’est lui qui dirige l’instruction du meurtre de Fualdès. Il en est de même pour l’avocat Mainier ou Delauro. A contrario, Fualdès, Monseignat ou Sasmayous ne renient en rien leurs idées républicaines.

Cette opposition se retrouve dans la vie politique municipale qui va de la chute de Napoléon à la Seconde Restauration avec l’intermède des Cent Jours, provoquant une valse des maires et des conseillers municipaux au gré des nominations et des destitutions.

 

Romiguière, maître Joseph-Louis

Avocat de Bastide, maître Romiguière fait paraître ensuite un Mémoire dans lequel il exprime ses souvenirs et ses convictions sur l’affaire, concluant sur l’innocence des condamnés. Révolutionnaire modéré, ayant rejoint les bonapartistes, il se cache au début de la Restauration après être devenu député de la Haute-Garonne durant les Cents Jours. Avocat défenseur des libéraux, il est nommé en 1833 procureur général de Toulouse puis conseiller à la cour de Cassation l’année suivante. Président du conseil général de Haute-Garonne, il est nommé pair de France en 1841.

 

Scomme…

 

Saavedra

Réfugié espagnol, arrivé en France en 1813, il avait, selon ses dires, occupé la fonction d’alcalde et de juge au tribunal criminel de Léon. Habitant une chambre située au-dessus de la cuisine des Bancal, lui et son épouse affirmeront haut et fort durant les procès qu’ils n’ont rien vu, ni rien entendu, s’étant couchés vers les 20 heures. Au point d’être accusés de faux-témoignages par le président du tribunal.

 

Sasmayous, François

Ami de Fualdès, ex-percepteur des contributions et franc-maçon, il est le dernier, avec l’avoué Bergounian, à avoir vu vivant Fualdès, jouant aux cartes chez le procureur avant que ce dernier quitte sa maison vers 20 heures. Le lendemain matin, appelé par une Marianne Fualdès inquiète de n’avoir pas revu son époux, il lui apprend la triste nouvelle.

 

Tcomme…

 

Teulat, Louis-Ignace

Louis-Ignace Teulat est un patriote de la première heure. Elu maire de Rodez du 15 novembre 1791 au 8 décembre 1792, montagnard sous la Terreur, il se range progressivement parmi les modérés puis devient royaliste à la fin de l’Empire. Juge d’instruction au tribunal de première instance, il instruit l’affaire dès le début, l’orientant vers la maison des Bancal.

 

Thabaud Hyacinthe, Joseph, Alexandre

Dit « Le sténographe parisien », il couvre l’affaire Fualdès, n’hésitant pas à forcer les traits de la ville et des personnages. Si son nom reste attaché à ce crime, il n’en demeure pas moins qu’il joue un rôle dans la littérature française en publiant l’œuvre du poète André Chénier, alors peu connu, et en découvrant le talent naissant de Georges Sand. Ami de Marcelline Desbordes-Valmore, il finit ses jours (1851) à Val d’Aulnay, aigri de n’avoir pas connu lui-même le succès littéraire malgré l’écriture de plusieurs pièces et romans.

 

Théron, Jean-Baptiste

Entendu comme témoin au procès d’Albi, mais absent du procès de Rodez, ce meunier, âgé de 22 ans, explique devant la Cour et les jurés qu’au soir du 19 mars, vers 23 heures, après avoir posé des crochets dans l’Aveyron pour attraper des poissons, il a vu le groupe des assassins descendre la côte des Besses, reconnaissant, malgré la nuit noire, tous les protagonistes présents sur le banc des accusés. Un témoignage qui tombe à pic, déclenchant l’ire des accusés. Sur son lit de mort, le 26 décembre 1821, âgé seulement de 26 ans, il déclarera avoir menti, n’ayant jamais vu la petite troupe transportant le cadavre du procureur.

 

Vcomme…

 

Vautre Victor, général

Militaire de formation, ayant combattu à Austerlitz et lors de la campagne de Russie, le général Victor Vautré se rallie à la Restauration, obtenant le commandement du département de l’Isère, puis de l’Aveyron au moment de l’affaire avant d’être muté quelques mois plus tard dans l’Ain.

 

Vielle

L’instrument le plus célèbre de l’affaire Fualdès, qui a donné son rythme lancinant à la fameuse complainte. Mais que n’a-t-on pas dit sur ces deux vielleux jouant le soir-même du crime du procureur ! Sans aucun doute pour cacher les cris d’effroi de l’infortuné Fualdès rendant l’âme sous les coups de ses assassins. Pourtant, aucun secret n’entoure ses deux musiciens des rues, venus à Rodez à l’occasion de la foire de la Mi-Carême et retrouvés à Digne. Jean-Baptiste Brès et Jean-Pierre Berlier étaient bien le soir du crime à Rodez avant de quitter la ville, pour l’un le 20, pour l’autre le 21 mars. Mais personne ne leur avait demandé de jouer à l’heure même du crime. Ni l’un, ni l’autre ne seront entendus comme témoins aux procès. En outre, longtemps les Ruthénois crurent qu’ils avaient été assassinés pour éviter qu’ils ne parlent. Deux squelettes déterrés à Rodez en 1841 laissèrent croire à cette rumeur. Fausse bien entendu !

 

Ycomme…

 

Yence, Jean-Joseph

Notaire à Sainte-Radegonde, marié à l’une des sœurs de Bastide, il est accusé de complicité de meurtre lors du troisième procès à Albi. Bergounian, l’ami de Fualdès, Bach et Clarisse Manzon déclarent l’avoir vu chez Bancal, le soir du 19 mars. Mais un alibi irréfutable convainc les jurés de son innocence.

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