La saga des statues disparues
Jamais statue n’aura fait couler autant d’encre que celle du colosse érigée sur la place d’Armes, le 19 mai 1861, œuvre du sculpteur ruthénois Gayrard.
En ces temps fort prudes, son érection soulève une très vive opposition, la contestation portant non sur le personnage mais sur son sexe offert aux quatre vents. Tandis qu’une pétition circule pour que la statue soit retirée du jardin, la presse fulmine contre « Lou débrogat ». « Qu’il se couvre ou qu’il se cache ! », ordonne-t-elle. Le maire, Adrien Rozier, ne reste pas sourd à cette contestation, faisant appliquer au colosse une feuille de vigne à propos et demandant que la statue soit montée sur une fontaine en beau grès rouge de Cayssiols alimentée par les eaux de Vors. L’œuvre, félicitée par le roi Charles X en personne, peut ainsi couler des jours heureux au pied de la cathédrale jusqu’au jour où la ville de Rodez désire élever un monument de la Victoire aux morts de la Grande Guerre. Versatiles, les Ruthénois, habitués à sa présence, protestent contre sa relégation au bas du jardin du Foirail, lieu d’exil habituel pour les statues qui ont cessé de plaire. Pas avares de phrases assassines, l’un d’entre eux y va de sa rimaille : « Raser un beau jardin, exiler un hercule, pour mettre à cette place un sujet de pendule ! » Sous le titre, « Chronique ruthénoise », voici comment un autre habitant perçoit cette mise à l’écart : « Son transfert s’est effectué sous l’œil placide de bons badauds. Autour de lui, à présent, c’est le silence et la fraîcheur au lieu du mouvement et de l’activité de la place d’Armes. Dans sa relégation, on lui a refusé la ressource suprême de présider aux ébats sportifs de la jeunesse, sur l’esplanade, et de lui servir de modèle : il lui tourne le dos. »
Rien de tel pour la statue de Vercingétorix, gloire de la résistance des Gaulois à l’occupant romain. Après avoir longtemps trôné dans le hall d’entrée de l’ancienne mairie, elle est reléguée sur l’esplanade du Foirail, face aux casernes. De quoi donner du courage à la soldatesque s’entraînant à proximité !
Le 17 avril 1904, toute la ville de Rodez inaugure, au fond de la place du Bourg, la fontaine de « La nymphe du Lévézou », œuvre du sculpteur Vernhes, symbolisant l’arrivée des eaux du Lévézou dans notre ville. Exit la statue de Blazy Bou, dit Lebon, grand bienfaiteur de la ville, relégué à son tour au Foirail, sur l’emplacement actuel du Monument de la Victoire. Le pauvre couturier n’a pas tenu plus de quatre ans place du Bourg. Les événements se chargeront plus tard de le ramener sur son lieu d’origine.
Qui se douterait, malgré leurs multiples déménagements, que la plupart de ces statues vont disparaître, victimes passives de la barbarie nazie ? C’est pourtant le triste sort que l’occupant leur réserve, détruisant notre patrimoine statuaire au profit de l’effort de guerre. Combat inégal contre lequel même Vercingétorix et Samson ne peuvent résister, rejoignant pour être fondus « La nymphe du Lévézou ».
Les récentes rénovations du jardin du Foirail ont provoqué le déplacement de la colonne de 1889 et l’enlèvement de plusieurs sculptures dont le buste de Louis Lacombe.
Et il ne faut pas oublier la statue du général Tarayre qui était au faubourg avant la construction de la maison de santé.
Pauvre général ! J’espere qu’ il trouvera une place en haut de l’avenue qui porte son nom.
Oui bien sûr ! Normalement, il doit retrouver sa place qd tous les travaux de l’avenue Tarayre seront terminés. Merci de votre message.